Psychologue Clinicienne
- Membre de la Fédération Française de Psychologie
- Expert judiciaire près la Cour d'Appel de Douai
- Membre de la Compagnie Nationale des Experts Psychologues ( CNEPSY)
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Outreau: La vérité abusée Vidéo LCIWAT sélectionnée dans Actualité
Dans l'affaire d'Outreau, douez enfants ont été reconnus victimes .
En 2006, on a pu voir à la télévision une commission parlementaire enquêter sur l'enquête d'un juge. Outre l'atteinte à la séparation des pouvoirs, cette enquête souleve le problème du secret professionnel , dont le jjuge Burgaud parle ci dessous. Mais surtout, ceux qui ont pu voir les vidéos des auditions, auront constaté avec quelle condescendance, avec quelle arrogance, avec quelle suffisance, des politiciens vieillisants qui n'ont jamais eu à faire face aux situations terribles qu'avait du affronter ce jeune juge, se sont complus à l'humilier en public devant les caméras.
Le juge Burgaud tient ici des propos qui expliquent ses actions, il faut également rappeler que les décisions de détention ne dépendaient pas de lui : les faits étaient terribles, les enfants disaient qu'ils avaient mal, que les adultes les agressaient dès qu'ils revenaient chez eux, les certificats médicaux attestaient les blessures subies, il s'agissait de protéger les enfants...
Audition du juge Burgaud : verbatim
Mis en ligne le 08 février 2006
par , mis à jour le 09 février 2006 à 01h58
Avant de répondre aux questions des députés de
la commission d'enquête sur Outreau, le juge Burgaud a prononcé, mercredi 8
février, un discours de plus d'une heure. tf1.fr vous propose de relire les
moments forts de cette première partie de l'audition
Les traits visiblement tirés, costume
gris, le jugeBurgaud a pris place à 16h40, mercredi, dans
la salle d'audition de la commission d'enquête parlementaire d'Outreau. En
préambule, le président de la Commission, André Vallini a rappelé avec force
que cette audition n'était "ni une instance juridictionnelle, ni une instance
disciplinaire". Bras croisés collés au bureau, le teint blafard,
le juge Burgaud a ensuite pris la parole pendant plus d'une heure.
"Vous imaginez l'émotion qui à cet instant est la mienne, parce que
je me trouve en présence des acquittés, a -t-il commencé la gorge nouée.
Aujourd'hui, peut-être plus que tout autre, je peux sentir leur souffrance, me
représenter ce qu'ils ont vécu, l'enfermement, la séparation d'avec des être
chers, d'avec leurs enfants,
leur honnêteté qui a été contestée".
"Je
suis tenu au secret professionnel mais je souhaite pouvoir vous répondre
complètement et me défendre. Ce n'est pas facile pour moi car encore hier le
Conseil supérieur de la magistrature m'a rappelé à mon obligation de
secret professionnel. Cela a choqué, mais je le dis et je le redis :
j'estime avoir fait honnêtement mon travail, sans aucun parti pris d'aucune
sorte et aux éléments du dossier fournis en 2001 et 2002 et non pas en fonction
des éléments apparus aux assises de 2004 et 2005". Le juge a ensuite
expliqué sa méthode de travail.
"Les
faits étaient horribles, les enfants disaient qu'ils avaient très mal"
"Selon
les enfants, l'affaire avait duré de nombreuses années - cinq années,
affirmaient-ils. Les faits auraient commencé en décembre 1995. Les enfants
expliquaient qu'ils étaient violés quotidiennement, qu'on utilisait des objets
de la vie quotidienne pour les sodomiser. Tout ceci décrit dans un climat de
violence, qui ressortait nettement dans la procédure, puisque les parents
étaient déjà suivis par les services sociaux pour des problèmes de consommation
d'alcool et de violences dans le couple."
"Les
enfants disaient être battus avec des lattes du lit. Ils disaient que lors des
séances de viols collectifs, les faits avaient été filmés à de nombreuses
reprises. Ça m'avait marqué : un des enfants expliquait que la caméra dans le
bureau du policier où il était entendu ressemblait à celle qui servait à filmer
les viols. Les faits étaient horribles, les enfants disaient qu'ils avaient
très mal, qu'ils saignaient régulièrement de l'anus. Ces faits semblaient
confirmés par des certificats médicaux, qui évoquaient des saignements de
l'anus et signalaient la présence de traumatismes crâniens".
"Je
n'ai jamais eu de fascination pour Myriam Badaoui-Delay"
"Dès
le départ, a-t-il poursuivi, la méthode employée pour l'enquête a été d'étudier
les accusations des enfants, puis ensuite de plusieurs des adultes qui ont
reconnu les faits et accusé d'autres personnes. Il s'agissait de vérifier
chaque fois que c'était possible les détails donnés comme les certificats
médicaux. Il s'agissait aussi d'éviter toute concertation entre les accusés.
Ils ont été placés dans des maisons d'arrêt différentes pour qu'ils ne puissent
pas se mettre d'accord sur une version commune. Nous avons essayé aussi de
faire en sorte que les enfants ne puissent pas communiquer avec les
adultes."
"On
a rarement des éléments qui puissent être irréfutables", a plaidé le juge.
"Mme Delay a reconnu les faits, elle a mis en cause beaucoup de personnes.
Je n'ai jamais eu de fascination pour Madame Delay. Je lui posais des
questions, elle me répondait. Je ne lui ai tenu aucune promesse, contrairement
à ce que certains disent." Par ailleurs, "des psychiatres l'ont
examinée et n'ont rien détecté sur une tendance particulière à
l'affabulation." Une réponse aux accusations de plusieurs acquittés,
affirmant que le juge Burgaud "avait été manipulé"
par madame Badaoui-Delay, condamnée définitivement à 15 ans de
réclusion criminelle. Il a par ailleurs indiqué que "quand des nouveaux
faits sont apparus", il a "à chaque fois sollicité l'avis du
procureur de la République" de Boulogne-sur-Mer (Pas-de-Calais),
Gérard Lesigne.
"Les
gens peuvent se tromper, ou mentir"
Poursuivant
son explication sur la méthode d'enquête, le juge a justifié son refus
d'organiser des confrontations individuelles, l'un des principaux griefs de la
défense des acquittés. "Je me suis souvent posé la question. J'ai
longtemps hésité. J'ai pensé que comme les personnes avaient été entendues
individuellement, je les avais interrogées séparément, avoir des confrontations
à plusieurs permettait de contester ce qu'avaient dit les uns et les autres et
pas de confirmer. J'y voyais plutôt une interactivité".
Et
au fil des auditions se forgeait sa conviction. "Les mis en examen qui
contestaient les faits disaient ne pas connaître les personnes qui les
accusaient (...). Un des mis en examen indiquait qu'un des enfants du couple
Delay qui l'accusait n'était jamais allé chez lui (...) J'ai entendu ce mineur,
qui me disait être allé chez ce mis en examen. Je lui ai présenté un album
photographique anonymisé : la couverture en était cachée, la légende
également. Dans cet album, l'enfant reconnaissait des photographies des pièces
du domicile, notamment la chambre du mis en examen. Il aurait pu reconnaître à
la rigueur la voiture, l'avoir vue à l'extérieur ; mais là, c'était
vraiment l'intérieur des pièces (...) cela semblait donner du crédit à
accusation. (...) C'était pas toujours facile. Les enfants disaient par exemple
qu'on leur présentait des revues en cadeau et on retrouvait chez un accusé
une revue pour enfant et une autre pour adulte."
Auditions,
vérifications : le juge a indiqué comment il avait été amené à se concentrer
sur certains accusés et à en écarter d'autres. "De nombreuses
personnes ont été citées. Mais les gens peuvent se tromper, ou mentir, et
parfois, il n'existait pas d'indices graves et concordants à l'égard de ces
personnes. (...) J'ai notamment à l'esprit le cas d'un médecin cité par les
enfants : il pouvait y avoir une confusion possible avec des actes médicaux
(...) certains faits pouvaient s'apparenter par exemple à un toucher
rectal". Avant d'évoquer les premières mises en examen : "lorsqu'il
y a eu des indices graves et concordants contre certaines personnes, j'ai
demandé aux policiers qu'elles soient déférées. Au vu de la gravité des faits,
j'ai pris la décision, après avoir entendu certains comme témoins assistés, de
les mettre en examen et de saisir le juge des libertés et de la
détention."
"Des
doutes, on en a eus"
Ayant
longuement décrit son instruction, le juge Burgaud a enfin voulu casser l'image
d'inhumaine froideur qu'avaient donnés de lui plusieurs des témoignages
d'acquittés. "Ce que je voudrais dire également, c'est que j'ai été
terriblement choqué d'être présenté comme une machine à appliquer le droit,
sans aucune humanité", a plaidé Fabrice Burgaud. "Bien que je mesure
le souffrance des personnes que vous avez entendues, je ne suis pas comme ça et
je n'ai pas tenu certains des propos qu'on m'impute". Ceci, sans renier sa
responsabilité : "Je n'ai pas la prétention d'avoir mené
l'instruction parfaite. Aurais-je pu faire autrement ? Aujourd'hui, avec le
recul, j'en suis convaincu. Est-ce que j'ai commis des erreurs d'appréciation ?
Peut-être. Qui n'en commet pas ? Le juge d'instruction est un homme seul.
Personne ne m'a dit à l'époque que je faisais fausse route. (...) Ceci dit, je
ne souhaite pas éluder ma responsabilité, et je souhaite assumer complètement
la responsabilité de l'instruction que j'ai menée." (...)
"Des
doutes, on en a eus, on en a eus pratiquement dès le départ", à propos de
certains témoignages ou déclarations qui faisaient état de "faits
qui semblaient monstrueux" a reconnu le juge d'instruction. Sur
les détentions provisoires qu'il a demandées au juge des libertés et de
la détention, il a souligné que "c'était une mesure pour protéger
les enfants", évoquant le cas d'un mineur qui avait déclaré que son père
avait "recommencé le soir même après avoir été entendu par les
policiers", sans citer de noms. Après sa déclaration, qui a duré
jusqu'à 17h45, a commencé une séance de plusieurs heures de
questions-réponses entre le magistrat et les membres de la commission.
Photo : le juge Burgaud, devant
la commission d'enquête parlementaire - DR
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