Christine de Pisan

Christine de Pisan

mardi 5 avril 2011

Alexandre Del Valle : Guerres contre l'occident : citations

ALEXANDRE DEL VALLE GUERRES CONTRE L'EUROPE


Page 8 :

Comme nous le montrerons tout au long de cet essai, la politique étrangère des États-Unis vise essentiellement à pérenniser l'hégémo¬nie américaine, sans rival depuis la fin de la guerre froide, et à empê¬cher l'apparition de concurrents géoéconomiques, principalement en Asie et en Europe occidentale. Elle est donc tournée en grande partie contre les intérêts des nations européennes. Toutefois, la politique consistant à désigner l'ami et l'ennemi, comme l' montré le polito¬logue Julien Freund, et la stratégie ayant pour tâche de mettre en oeuvre les buts fixés par les politiques, il convient de hiérarchiser préa¬lablement les inimitiés et les menaces, car en politique internationale comme en science militaire, il a toujours été périlleux, voire funeste, de lutter sur deux fronts en même temps.
Nous définirons donc l'Amérique, non pas comme l'ennemi existen¬tiel des Européens, mais comme un adversaire-concurrent àl’intérieur de l’aire occidentalo-européenne. Un adversaire souvent dangereux, décidé à utiliser tous les moyens pour parvenir à ses fins et empêcher la vieille Europe de s’émanciper de son leadership, mais qu’on le veuille ou non, un rameau de la civilisation européenne, sa « branche occidentale mutante ». L'ennemi existentiel, ou plutôt la menace « géo vilisationnelle » principale, pour paraphraser Huntinaton — celle-ci n'étant encore incarnée par un ennemi singulier — est incontestablement représentée, quant à elle, par le totalitarisme théocratique que constitue l'islamisme, dont se réclament plusieurs régimes du monde musulman', indépendamment de leurs divisions : Arabie Saoudite, Pakistan, Soudan, Afghanistan, Iran, Tchétchénie (avant la dernière guerre russo-tchétchène), etc., certains d'entre eux étant d'ores et déjà détenteurs de l'arme atomique — ou sur le point de la posséder — et bénéficiant de surcroît de la manne financière du pétrole. Cette menace fondamentale, pour les valeurs, la sécurité collective, la souveraineté et la survie même des États d'Europe, à la fois dépendants du pétrole du Golfe et socialement ébranlés par l'immigration extra-européenne incontrôlée et le terrorisme islamique, est d'une certaine manière totale, c'est-à-dire existentielle, bien antérieure à l'époque moderne mais plus actuelle que jamais, la globalisation n'ayant fait que décupler ses moyens et champs d'action. On ne peut donc pas mettre cette menace fondamentale au même niveau que l'adversité américaine, en quelque sorte interne, quant à elle, à la civi¬lisation européo-occidentale, donc endogène.

Page 15 :

Nous esquisserons, (…) — non sans avoir fait jus¬tice de la guerre des représentations aux termes de laquelle la notion d'« Occident » est utilisée comme un véritable « leurre civilisation¬nel » servant de cache-sexe à l'hégémonisme américain et à entraîner l'Europe dans des entreprises néo-impérialistes et bellicistes dites « occidentales » mais contraires à ses intérêts vitaux — les contours de la Grande Europe des nations du xxr siècle, la plus évidente et la plus plausible, parce que autant géopolitique que politique — alliant les données de la géographie humaine, les traditions civilisationnelles et la défense des intérêts géostratégiques communs, et donc la seule susceptible de relever les défis et menaces décrits précédemment. La colonne vertébrale stratégique idéale de cette Grande Europe conti¬nentale serait bien évidemment l'axe Paris-Berlin-Moscou, comme l'ont démontré les généraux et stratèges français Pierre-Marie Gallois et Henri Paris, si toutefois l'Allemagne renonçait une fois pour toutes à ses vieux démons pangermaniques et jouait sincèrement le jeu de l'unité européenne. Nous formulerons ainsi quelques propositions, essentielles à nos yeux, visant à promouvoir une pensée géopolitique ainsi qu'une politique de défense européennes réellement autonomes, c'est-à-dire au service d'une Europe ouverte vers le monde slavo¬orthodoxe et résolument indépendante — ce qui ne signifie pas enne¬mie — des États-Unis.

Page 96 :

Ceux qui embrassent la religion de Mahomet sont souvent d'anciens militants d'organisations plus ou moins révolu¬tionnaires d'extrême gauche, à commencer par le célèbre terroriste pro-palestinien Carlos, converti à l'islam dans sa prison, d'où il lance à présent des appels à la révolution islamique « néo-wahhabite » des talibans, ou encore le philosophe communiste Roger Garaudy. Mais. plus surprenant, de plus en plus d'entre eux viennent d'une certaine extrême droite — par déception à l'égard de la passivité des Chrétiens pour les uns, par calcul antisémite pour d'autres — héri¬tière de François Genoux ou René Guénon et de leurs disciples contemporains (Nouvelle Droite « antisioniste », GRECE, etc.). Tel est le cas de l'Italien Claudio Mutti, intellectuel reconnu au sein de la mouvance « néo-païenne » d'Italie du Nord. Aujourd'hui rebaptisé Omar Amin, cet ancien leader du mouvement radical Terza Posizione fait la navette entre l'Iran et le Soudan, traduit des Corans, et est devenu l'une des têtes pensantes de l'islamisme italien. De la mou¬vance d'extrême droite, on peut remarquer également la figure parti¬culière de Tahir de la Nive, Français converti installé à Londres. Vétéran de la guerre d'Afghanistan, ce courageux doctrinaire combattant, très respecté dans certains milieux Skin Head (revue Centurio en France) et de la Nouvelle Droite, dirige aujourd'hui l'Islamic Council for the defence of Europe et prône une sorte de « nationalisme islamique européen ».


Page 161 :
Cette doctrine stratégique « globale 2» des États-Unis apparait ¬clairement dans le nouveau concept américain de « stratégie natio¬nale de sécurité », dont le contenu fut révélé au grand public à l'occasion de la parution, le 8 mars 1992, dans le New York Times, d'une version du « Defence Planning Guidance »' du Pentagone élaboré en liaison avec le Conseil national de sécurité (NSA), plus haute instance américaine de sécurité et de politique internationale. On y apprend que les États-Unis d’Amérique doivent tout faire pour « dissuader d’éventuels rivaux parmi les pays avancés et industrialisés, de défier notre domination, ne serait-ce que d'aspirer à un rôle plus grand à l'échelle mondiale ou régionale (...). La mission des États-Unis sera de s'assu¬rer qu'il ne soit permis à aucune puissance rivale d'émerger en Europe occidentale, en Asie ou sur le territoire de la CEI ». En bref_ il s'agit ni plus ni moins d'empêcher l'Europe et le Japon, « alliés » relativement dociles, ainsi que la Russie, affaiblie, mais encore redou¬tée, de relever la tête et de porter un jour ombrage à l'« hégémonie bienveillante » de Washington, en fait à la formidable machine écono¬mico-commerciale américaine. « La politique étrangère américaine doit se donner pour but de convaincre d'éventuels rivaux qu'ils n'ont pas besoin de jouer un plus grand rôle. Notre statut de superpuis¬sance unique doit être perpétué par une force militaire suffisante pour dissuader n'importe quelle nation ou groupe de nations de défier la suprématie des États-Unis, et de chercher à mettre en cause l'ordre économique et politique établi (...). Nous devons empêcher l'émergence d'un système de sécurité exclusivement européen qui pourrait déstabiliser l'OTAN. En Extrême-Orient, il faut rester atten¬tif aux risques de déstabilisation qui viendraient d'un rôle accru de nos alliés, en particulier du Japon », explique le Defense Planninc Guidance. On constatera qu'il n'y est point fait allusion au rôle de l'ONU ou à quelque forme que ce soit « d'internationalisme collec¬tif » dont les discours officiels américains sont en général remplis. De fait, le rapport « secret » précise plus loin : « Ce qui est important c'est le sentiment que l'ordre international est en fin de compte sou¬tenu par les États-Unis, lesquels doivent être en position d'agir indépendamment lorsqu'une action collective ne peut pas être orchestrée. » On comprend mieux, à la lumière de ces documents stratégiques, pourquoi les États-Unis agissent sous mandat de l'ONU en Irak, lorsque les résolutions des organisations internationales cor¬respondent aux intérêts américains strictement nationaux, mais pas¬sent outre en ex-Yougoslavie, dès lors que l'«internationalisme » ne peut pas être utilisé comme façade « cache-sexe stratégique » du nationalisme géoéconomique américain. Les dirigeants états-uniens n'en continuent pas moins d'affirmer que la « suprématie globale » de leur pays est nécessaire à l'humanité, puisqu'elle est censée « garantir la démocratie et la paix » dans le monde et la « sauvegarde de l'écono-mie de marché ».


Page 164 :

Le président Eisenhower pouvait dire : « Parmi les nations vouées à la justice et à la liberté, le destin nous a assigné le rôle de. diriger les autres 6. » (…) Écoutons plutôt Richard Nixon : « Dieu veut que l'Amérique dirige le monde »

Page 201 :

Le stratège américain Zbigniew Brzezinski, qui a le mérite d'exprimer les choses sans détour, reconnaît lui-même que « la nature cosmopol¬ite de la société américaine a permis aux Etats-Unis d'asseoir plus facilement leur hégémonie dans le monde sans laisser transparaître son caractère strictement national (...). La domination culturelle des États- Unis a jusqu'à présent été un aspect sous-estimé de sa puissance glo-bale. Quoi que l'on pense de ses qualités esthétiques, la culture de masse américaine exerce, sur la jeunesse en particulier, une séduction irrésistible. Les programmes américains alimentent les trois quarts du marché mondial de la télévision et du cinéma. De ces avantages l'Amérique tire un prestige politique et une marge de manoeuvre inégalés3».

Page 218 :

Conscient que la réalité est aux antipodes de ce qu'il est parvenu à inculquer aux opinions occidentales, James Harff raconte : « Il n'a pas été facile de mettre l'opinion juive de notre côté. C'était un sujet difficile et le dossier était dangereux vu de cet angle. En effet, le président Tudjman avait été très maladroit dans son livre La Déroute de la vérité historique [le Président croate affirmait entre autres qu'un million de Juifs au maximum étaient morts pendant l'Holocauste]. À la lecture de ses écrits, on pouvait l'accuser d'antisé¬mitisme. [Tudjman déclara que l'Holocauste n'avait jamais existé.] En Bosnie, la situation n'était pas meilleure : le président Izetbegovic soutint énergiquement la création d'un État islamique fondamenta¬liste dans son livre, La Déclaration islamique (...). Le passé de la Croatie et de la Bosnie avait été marqué par un antisémitisme réel et cruel ". » Précisons d'ailleurs qu'Izetbegovic, adepte du double langage, a appartenu, pendant la Seconde Guerre mondiale, à la divi¬sion SS Handchar... Mais peu importe, précisent les « pro » de la « communication ». Depuis le montage de Timisoara, on sait que des images, « travaillées » manuellement ou par ordinateur, peuvent créer une réalité virtuelle lorsque la réalité effective contredit les impératifs stratégiques du moment... Plus « grand coup » médiatique de toute l'histoire des guerres en Yougoslavie, nous avons fait allusion précé-demment à une photo qui montrait un présumé Bosniaque musulman au profil squelettique derrière les barbelés d'un « camp d'extermina¬tion serbe » à Trnopolje. Une publicité de Médecins du monde ajou-tera sur la photo un mirador à côté des maigres figures de prisonniers « bosniaques » avec pour slogan : « Les nationalistes serbes iront jus¬qu'au bout de leur logique meurtrière. (...) Purification ethnique cela veut dire camps, viols, assassinats, exécutions et déportations en masse de populations non serbes de Bosnie-Herzégovine et de Sarajevo. Médecin du monde a choisi de continuer ses missions (...) mais n'a pas choisi de se taire. » Le journaliste allemand Thomas Deichmann, qui avait décelé des anomalies sur la photo, révéla quelques mois plus tard que l'homme en question n'était pas un Bosno-musulman mais un Serbe de Bosnie, que le camp n'était pas celui de Trnopolje, mais un camp de réfugiés serbes de transit. En réalité, les équipes de journalistes de la chaîne britannique ITN avaient donné l'illusion d'un « camp de concentration » entouré de barbelés, en filmant les réfugiés serbes derrière un terrain clôturé, à Manjaca. En fait, le « camp » en question n'avait jamais été entouré de barbelés, ceux-là ayant été placés autour de l'endroit où se trou¬vaient les journalistes afin de protéger leur matériel contre le vol ! « Ces rectifications et dénégations n'effaceront pas l'image vraie et pourtant mensongère diffusée par ITN " », commente le journaliste Patrick Besson, la terrifiante image demeurant pour beaucoup la preuve de l'existence de « camps de concentration » en Bosnie cin¬quante ans après l'Holocauste. Qu'en dirent les rescapés des camps nazis et les autorités morales réputées les plus qualifiées pour juger l'affaire ? Ils démentirent formellement pour la plupart. Après une visite des camps de prisonniers tenus par les Serbes, Elie Wiesel et Simone Veil déclarèrent publiquement que « ces installations n'ont rien à voir avec Auschwitz ». Quant à Simon Wiesenthal, historien de l'Holocauste, il tint à mettre en garde contre la banalisation du terme « camps de concentration », rappelant que les premiers réfugiés de la guerre furent les 40 000 Serbes fuyant la Croatie après qu'un amende¬ment à la Constitution en ait fait des « sous-citoyens », comme les Juifs et les Tziganes.

Page 220 :

D'un côté, les « Occidentaux » traitent de « nazis » les royalistes tchetniks serbes, qui furent pourtant derrière le général Mikhaïlovic et aux côtés des partisans communistes yougoslaves, les plus féroces résistants au militarisme nazi. De l'autre, les oustachis croates et leurs héritiers directs sont invités à Bonn ou à New York en tant que « nationalistes » luttant contre le totalitarisme de la « Grande Serbie ». Une telle politique de « deux poids deux mesures » et de duperie de l'opinion semble difficilement explicable par le seul argu¬ment de l'ignorance ou de la naïveté. « Celui qui n'est pas capable d'enlever au couteau un enfant du ventre de sa mère ne peut être un bon oustachi 47 », lançait en 1942 à ses troupes Ante Palevic, chef ous¬tachi pro-nazi. Aussi entre 1941 et 1943, Herman Neubacher, envoyé spécial d'Hitler dans les Balkans, signalait au Führer que les oustachis croates avaient tué plus de 700 000 Serbes et déporté près de 300 000 autres, attestant que seuls « 240 000 avaient tout de même pu s'enfuir 48 ». Quant aux 40 000 Juifs de Croatie, ils subirent pour la plupart le sort promis par Palevic et furent assassinés ou déportés. (…)En réalité, ce fut Tudjman, pourtant reçu dans toutes les capitales occidentales, qui permit le renouveau de l'ex¬trême droite en Croatie, qui y fit enterrer avec les honneurs le corps de Palevic et surtout réhabilitera le négationnisme, après avoir per¬sonnellement nié l'Holocauste dans ses discours publics comme dans ses écrits (La Déroute de la vérité historique, Zagreb, 1989).
(...)
Mais voyons également un peu ce qu'il en est du côté des « démo¬crates » bosno-musulmans, eux aussi dépositaires d'un lourd passif collaborationniste. « La seule voie pour la jeunesse musulmane est celle d'Hitler et de Palevic " », expliquait, en 1943, l'un des plus grands chefs religieux bosno-musulman, Muhammad Pacha. Donc, au cours de l'été 1941, des centaines de milliers de Serbes — hommes, femmes, enfants — furent massacrés dans toute la Croatie. On comprend alors peut-être mieux pourquoi, après de tels persécutions subies, et dans le souvenir de cinq siècles d'occupation turco-ottomane, les Serbes de Bosnie ne voulaient pas vivre avec les Croato-musulmans et pourquoi ils revendiquèrent, en vain, leur rattachement à la Serbie, l'équivalent ayant pourtant été accordé aux Croates de Bosnie. Aussi Henry Kissinger alerta-t-il à plusieurs reprises les autorités américaines : « Le comportement des Croates et des Musulmans n'a été en rien moins condamnable que celui des Serbes, sauf qu'il a été excusé par les médias et vu d'un oeil complice par l'administration américaine (...). La tentative d'incorporer la population serbe-bosniaque à la sou¬veraineté de la Bosnie — violant notre principe d'autodétermination — et ignorant la lutte séculaire des Serbes contre la domination musulmane — est le contraire de notre intérêt national ". » La haine antichrétienne et antijuive du président Alija Izetbegovic, telle qu'elle transparaît, tant dans les faits (purification ethnique progres¬sive de la Bosnie) que dans les écrits, n'a pour sa part rien à envier à l'antisémitisme de l'extrême droite croate.

Page 222 :

Izetbegovic. Né en 1925, il s'engage avant la guerre dans les Jeunes musulmans, mouvement fondamentaliste anti-occidental combattant les « dérives modernistes de l'Islam ». Au printemps 1943, le futur président bosniaque dirige les Jeunesses musulmanes pro-nazies de Sarajevo. À ce titre, il reçoit dans la capitale bosniaque Amin al¬Husseini, le grand mufti de Jérusalem, pilier de l'entente islamo-nazie contre les « sionistes » et ami personnel d'Hitler, qui l'accueillera en Allemagne pendant la guerre. Comme les Frères musulmans, il prône le jihad contre les Juifs, la solution finale étant réinterprétée à la lumière du « combat sacré sur le chemin de Dieu » (Jihad Fi Sabil¬Allah). À son appel, vingt mille Musulmans bosniaques s'engagèrent dans la Waffen SS. Aussi Izetbegovic sera-t-il l'un des organisateurs de la fameuse division SS musulmane Handchar (du terme yatagan, ou sabre). Aux côtés de la Handchar seront constituées la division musulmane SS Kama (couteau, poignard), les milices de Nasid Topcic et Hajji Effendic appelés Cadres verts, sévissant en Bosnie orientale, ainsi que la Légion islamique de Huska Milikovic, en Bosnie orien¬tale. Dans son ouvrage La Waffen-SS, l'Américain George H. Stein commente : « Spéculant sur la traditionnelle haine des Musulmans envers les Chrétiens serbes, qui formaient le gros des partisans de Tito, la Waffen-SS put recruter très vite des milliers de jeunes volon¬taires dans ces communautés ". » Aussi les SS musulmans se singula¬risèrent-elles dans le massacre de milliers de Serbes et de Juifs. Après la victoire des Alliés, en 1946, Izetbegovic est condamné à trois ans de prison pour « nationalisme et islamisme » par le pouvoir communiste de Belgrade. La suite est connue. 1970 : première version de sa Déclaration islamique ; 1984 : condamnation à 14 ans de prison (non effectués intégralement) pour « nationalisme musulman visant à faire de la Bosnie un État ethniquement pur » ; 1990: seconde édition de la Déclaration ; 1992-1995 : sécession de la Bosnie, victoire sur les Serbes grâce à l'alliance militaire croato-musulmane, à l'aide « occi¬dentale » et au soutien de l'islamisme mondial. ….

Page 225 :

Pour Aleksander Singer, président de la Fédération des communautés juives de Belgrade, qui perdit 65 membres de sa famille dans l'Holocauste, « ce qui s'est accompli en Bosnie, en Croatie ou au Kosovo, bien qu'horrible, n'est pas un génocide. Il n'y a jamais eu de tentative d'extermination d'une race entière — hommes, femmes et enfants — simplement à cause de leur identité religieuse ou ethnique (...). Bill Clinton et Tony Blair, en comparant les attaques serbes au Kosovo à l'élimination massive perpétrée par les nazis, manipulent aussi les Juifs "

Page 346 :

Écoutons plutôt Alexandre Zinoviev, déclarant aux Serbes, durant la guerre du Kosovo : « Nous avons sauvé l'humanité de la menace la plus terrible : le fascisme. À présent nous sommes attaqués par un nouvel ennemi commun, l'impérialisme américain, qui cherche à dominer le monde. (...)» D'après Zinoviev, l'humanité serait en fait entrée, sous l'influence de l'hégémonie américaine, dans l'« ère post- démocratique », la planète étant devenue « mono-étatique » ou « monopolaire », les Etats-Unis exerçant une hégémonie globale, pour l'heure, incontestée. « Si bien que la démocratie est désormais superflue pour les dirigeants du monde occidental. Bien plus, elle a commencé à les gêner dans leur conquête du pouvoir mondial. » Aussi l'ancien dissident russe n'hésite-t-il pas à affirmer que l'Occident, sorti victorieux de la guerre froide, se dirige « vers un totalitarisme d'un genre particulier (...), belliqueux qui s'avance sous le déguisement de l'humanisme, de la démocratie, de la lutte pour les droits de l'homme, de la justice 41 ».

Page 358 :

Pour le philosophe personnaliste Emmanuel Mounier, c'est la place accordée à la personne humaine, apport majeur du christia¬nisme, grâce au dogme de l'Incarnation, qui caractériserait le plus la civilisation occidentale. À l'époque moderne, la notion d'individu, voisine, mais plus impersonnelle et sécularisée, a pris le relais de la personne, ce qui donna naissance — à la faveur des progrès maté¬riels, du consumérisme et de la défense croissante des libertés et droits particuliers — à l'individualisme occidental, dans ces aspects les plus louables (respect de la liberté individuelle, liberté de conscience, sauvegardes de droits inaliénables, etc.), comme dans ces dérives sociologiquement « pathologiques » (Zinoviev) : individualisme, anar¬chie, perte des repères et de l'esprit civique, déclin de la conscience collective et des valeurs familiales, etc. Après le statut unique de la personne humaine, l'autre grande caractéristique de la civilisation européenne est incontestablement l'universalisme. Cette prétention à l'universalité était déjà annoncée tant dans la pensée philosophique des auteurs grecs ou latins hellénisés que dans la praxis impériale hellénistique (Philippe, Alexandre) et romaine. …

Page 359 :

le démocratisme manichéen, hypocritement mora¬liste et arrogant du président Wilson et de ses héritiers actuels : Madeleine Albright, Zbigniew Brzezinski ou Bill Clinton, a sup¬planté, en tant que référence politique et philosophique, la tradition démocratique européenne fondée sur la coutume et le réformisme, de Tocqueville — déjà conscient des dangers de la démocratie totalitaire américaine — à Raymond Aron, en passant par Jean Jaurès, envers qui ceux qui l'évoquent aujourd'hui sont à peu près aussi fidèles que ceux qui se réclament du général De Gaulle...

Page 370 :

la guerre « occidentale » contre la Serbie a bien montré qu'en dépit de décennies d'idéologie communiste athée et de la baisse généralisée de la pratique religieuse, la religion, en tant que réalité identitaire, culturelle et historique fondatrice, n'a pas cessé de faire sens et d'imprégner profondément les consciences collectives. À n'en point douter, l'édification d'une Europe unie et forte, indépendante de l'Empire thalassocratique américain, passe par une « réconciliation civilisationnelle » entre les « deux poumons de l'Europe », l'occiden¬tal et le post-byzantin.

Page 404 :

Dans son ouvrage Le Grand Échiquier, Zbigniew Brzezinski, qui se plaît souvent à comparer l'Empire américain à Rome, rappelle que l'une des causes majeures de l'effondrement de l'Empire romain, fut— outre la cassure Orient/Occident — « la décadence culturelle, l'hédonisme culturel, qui (...) a sapé la volonté de grandeur de l'élite politique " ». Ainsi l'ancien conseiller de Jimmy Carter explique-t-il que le déclin des empires est pratiquement toujours dû à des causes internes, citant parmi les principales, le « manque de ressort social, la décadence, l'hédonisme (...) provoquant l'effondrement des struc¬tures du pays ». Tout en se félicitant du fait que la culture de masse américaine — « même dans ses aspects les moins sophistiqués (...) et quoi que l'on pense de ses qualités esthétiques — exerce, sur la jeunesse en particulier, une séduction irrésistible », Brzezinski reconnaît lui-même que « la domination américaine sur les communications et les spectacles populaires (...) véhicule un hédonisme superficiel et des styles de vie stéréotypés 12 ». Mais esquivant ainsi le principal talon d'Achille de sa théorie de la supériorité du modèle américain. Zbigniew Brzezinski évite de faire le parallèle entre la décadence morale de Rome et celle des sociétés occidentales contemporaines, elles aussi abreuvées, de manière probablement plus généralisée que Rome encore, au consumérisme passif, à l'hédonisme, et incontestablement menacées, dans leur cohésion et leur pérennité mêmes, par la
les graves pathologies sociales que constituent la dénatalité massive. la perte des valeurs morales et familiales, l'effondrement des références religieuses ou même des valeurs civiques laïques de substitution (Durkheim), bref, la montée générale du nihilisme et d'une mentalité antisociale diffuse, que Gilles Lipovetsky a parfaitement analysé dans son ouvrage L'Ere du vide.

Page 403 :

le sociologue russe Zinoviev déplore qu'à la place des cultures nationales démocratiques, « ravalées à un niveau misérable (...) s'ins¬talle la culture, ou plutôt la pseudoculture de l'occidentisme (...). La masse populaire se voit offrir un succédané de démocratie sous forme de débauche, de laxisme des autorités, de distractions aisément acces¬sibles, d'abandon à soi-même, bref un système de valeurs qui libère l'individu de tout effort personnel et de toute contrainte morale 9 ».

Aucun commentaire: